Le jeune Shahzaib, 17 ans, n’est pas orphelin, il a des parents et une famille. Alors pourquoi le surnommons-nous « Tom Sawyer » ? Car tout comme ce célèbre héros fictif, Shahzaib est un véritable aventurier des temps modernes. Il n’a reculé devant rien pour voyager jusqu’en France et, vous allez le voir, son histoire est bouleversante. L’équipe de Toombow Kids a pu s’entretenir avec lui en anglais afin qu’il nous partage son parcours hors du commun.
Shahzaib est né à Mandi Bahauddin, une ville située dans la province du Pendjab au Pakistan. Son enfance est marquée par la précarité et le manque de moyens technologiques qui le privent d’un meilleur accès au savoir. Cependant, il s’estime tout de même chanceux d’avoir pu aller à l’école même si les conditions étaient rudes : les professeurs le punissaient souvent, lui et ses copains, avec des coups de bâtons et les obligeaient à tenir en équilibre dans des positions dégradantes sous peine de sanctions. Hélas, cela est loin d’être le plus dur qu’eut à supporter Shahzaib. À l’origine des plus gros conflits, des divergences autour de la religion. Ses parents croient chacun en un courant différent de l’islam, son père étant sunnite et sa mère chiite. Hélas, pour son oncle paternel, il a toujours été inconcevable qu’une chiite puisse s’intégrer à la famille. La gorge nouée, Shahzaib se souvient :
« Mon oncle détestait vraiment ma mère et il me haïssait aussi comme j’étais son fils. C’était un policier corrompu et il nous menaçait souvent. Un jour, il est arrivé fou de rage chez moi. Il m’a cassé le bras et m’a fait des brûlures aux mains avec son briquet. »
Après que l’oncle et ses collègues se soient saisis de leur domicile, Shahzaib et ses parents partirent en cavale. Leur objectif : atteindre la France. Pour ne pas se faire repérer, ils durent se séparer et chacun partit de la ville caché dans le coffre d’une voiture. C’est à 13 ans et demi que Shahzaib partit du Pakistan avec pour première destination l’Iran. Il apprendra plus tard que ses parents eurent moins de chance que lui et furent stoppés à la frontière. Pour ce périple, le jeune garçon effectua toute la traversée à pied avec un groupe d’une centaine de personnes, le tout dans des conditions extrêmes ; le jour une chaleur ardente, le soir des nuits glaciales, sans oublier les dangers de la nature. Shahzaib évoque plusieurs de ses camarades décédés des suites de morsures de serpent. Une fois arrivé en Iran, il voyage en voiture jusqu’en Turquie avant de partir à pied vers la Grèce. Là-bas, il se casse le bras dans une chute en montagne qui aurait pu être beaucoup plus grave. Une fois rétabli, il enchaîne sans relâche les kilomètres en traversant la Macédoine, la Serbie, la Bosnie, la Croatie, l’Italie. Des jours entiers d’affilée sans manger, les attaques de sangliers sauvages, le stress d’être arrêté à tout moment par des gardes-frontières, l’insécurité dans les camps de réfugiés, tant d’épreuves auxquelles Shahzaib fut confronté avant d’arriver en France à ses 17 ans. À présent, il ne rêve que d’une chose :
« Je veux que ma famille vienne ici même si c’est difficile. Je suis en contact avec eux mais ils doivent faire attention et changer souvent de ville pour ne pas se faire attraper. »
Pour le moment, Shahzaib est accueilli dans un hôtel mais sa situation n’est pas stable. Il se démène pour apprendre le français afin de trouver un employeur qui l’accepte et n’a pas de solution de secours si l’hôtel venait à l’expulser. Son combat est loin d’être terminé, mais il a la rage de vivre et Toombow Kids souhaite de tout cœur que Shazhaib obtienne un jour la vie dont il a toujours rêvé.